Julie et Charlotte Bonaventura font partie des quinze binômes d'arbitres présents à Rio. Seules représentantes françaises, ce sera leur 2ème participation à un tournoi olympique après Londres en 2012. Elles auront notamment pour mission de faire appliquer les nouvelles règles qui accompagnent désormais le hand international.
par Yves MICHEL
Depuis 1980 et Moscou, l'arbitrage français a toujours été représenté aux Jeux Olympiques. Julie et Charlotte Bonaventura (dans cet ordre sur notre photo de tête) ont atterri ce mardi à Rio pour se fondre dans la masse des quinze binômes (dont trois féminins) qui siffleront les 76 matches du tournoi olympique (dames et messieurs confondus). La paire provençale fait partie du haut du panier et les Fédérations Internationale et Européenne n'ont pas hésité ces dernières années à leur confier de véritables responsabilités. Comme la finale féminine des JO de Londres en 2012 entre la Norvège et le Monténégro, celle de l'Euro 2014 entre la Norvège et l'Espagne et plus récemment en décembre, l'apothéose du Mondial danois entre les Pays Bas et la Norvège. « On savait que si on faisait un bon Mondial, on aurait toutes les chances d’aller à Rio. Le fait d’être retenu est la suite logique de notre travail. Après, on ne maîtrise pas tous les paramètres. Ce qu’on a toujours essayé de maintenir, c’est une certaine régularité dans le niveau. » Et a priori donc, cela a bien fonctionné.
Il y a quatre ans, pour la 1ère fois dans l'histoire, deux paires tricolores avaient été sélectionnées pour Londres. Laurent Reveret et Nordine Lazaar avaient accompagné les deux sœurs. Juste après l'aventure londonienne, le binôme s'est séparé et Laurent Reveret a du refaire ses gammes avec Stevann Pichon. Pas encore totalement installés dans le paysage international, Rio leur est passé sous le nez. «C’est une chance exceptionnelle de faire les J.O qui plus est, deux fois de suite, reprennent en cœur les jumelles. Comme les joueurs et tous les athlètes qui y sont, c’est un rêve de gosses. Pour nous, c’est pareil. Nous avons une sincère pensée pour "Lolo" et Stevann. Ils ont beaucoup donné depuis la formation de leur binôme avec comme objectif, les Jeux. Et puis, ils ne sont pas sur liste. On essaiera de faire du bon boulot pour eux et pour que cela rejaillisse sur l'arbitrage français. » A cette heure, Julie et Charlotte ne savent toujours pas à quel moment, elles entreront en piste et dirigeront leur 1ère rencontre. Quoi qu'il en soit, depuis le 3 juin et la dernière rencontre officielle qu'elles ont sifflée en LNH, elles se sont sérieusement préparées. « On a coupé une semaine et on a repris en insistant sur le foncier. Le plus dur, c’est de ne pas avoir eu le rythme des matches pendant cette période. » Un passage à l'Eurotournoi, histoire de retrouver le parfum du haut niveau et les revoilà dans une ambiance qu'elles affectionnent tout particulièrement. Le souvenir de 2012 est passé par là. « C'est quand même un monde à part. Et tu mesures aussi à quel point, le hand n'est pas le centre du monde. Tu te sens tout petit par rapport à l'évènement. A Londres, on sentait que tous les gens qu'on croisait étaient heureux d'y être. On est là pour une mission bien précise mais on va essayer d'en profiter au maximum. Trois semaines, c'est un peu long donc il faut aussi se changer les idées. Et puis, Rio est une belle ville ! (rires) » Les jumelles seront de toute façon sollicitées notamment sur le tournoi féminin. Il y a quatre ans, elles avaient eu le plaisir d'arbitrer un Serbie-Corée masculin et personne n'avait trouvé à redire tant leur prestation avait été sans accroc. « On est sensée diriger des matches de filles… et de garçons mais le milieu de l’arbitrage reste encore assez macho même si les mentalités sont en train d’évoluer. On va tenter de leur forcer la main… enfin, de leur montrer qu’ils peuvent nous faire confiance.» Et du côté de la persuasion et de la faculté à se faire respecter, personne ne doute que les sœurs Bonaventura sauront répondre présent.
Cinq nouveautés à assimiler
Testées lors du Mondial juniors au Brésil en août 2015, cinq nouvelles dispositions viennent renforcer l'arsenal arbitral du handball. Pour la 1ère fois, elles seront appliquées dans un tournoi séniors... aux Jeux de Rio. Julie et Charlotte Bonaventura ont bien voulu, à leur façon les commenter.
* Entrée d'un 7ème joueur sans chasuble à la place du gardien et sans infériorité numérique
« Cela va demander plus d’attention de la table et des arbitres surtout lorsque le gardien sera dehors. Aucun joueur ne pourra pénétrer dans la zone pour remplacer le gardien sauf… s’il a la chasuble. Car elle n’est pas supprimée. En fait, cette nouvelle règle est une possibilité tactique supplémentaire. Quand le gardien sera sur le point de rentrer, n’importe lequel des 7 joueurs sans chasuble pourra sortir. Ça peut engendrer des buts stupides comme on l’a vu à l’Eurotournoi. »
* jeu passif et maximum de 6 passes dès le bras levé
« Quand la règle aura été assimilée, les gens autour du terrain (supporters, banc,…) vont certainement se mettre à crier et compter jusqu’à 6. Cela peut être une aide pour les arbitres qui ne savent pas compter (rires). Sincèrement, pour nous, cela ne change pas grand-chose. »
* retour différé du joueur blessé
« C’est sensé limiter les abus et réduire les temps morts médicaux. C’est laissé à notre appréciation. Si le joueur blessé doit sortir, il ne pourra faire son retour qu’au terme de trois possessions de balle. Et non trois attaques comme certains le pensent. »
* faute intentionnelle dans les 30 dernières secondes de jeu
« On a réduit la durée de moitié mais la sanction est plus forte puisque s’il y a faute intentionnelle, quel que soit l’endroit du terrain, il y aura carton rouge et… 7 mètres. Normalement, cela devrait conséquemment réduire les actes d’anti jeu sur des matches tendus. Mais l’application de cette règle n’est pas évidente. Même si un attaquant stoppé illicitement parvient à transmettre le ballon à un partenaire qui poursuit l’action, il faudra siffler et appliquer la règle. Ce sera difficile à faire comprendre par exemple, aux supporters de l’équipe sanctionnée. »
* carton bleu - double peine
« C’est pour améliorer la communication. Si après le carton rouge, on sort un bleu, il y aura un rapport à l'issue du match. Avant, il fallait le signaler à la table et cela suffisait. »