« Je ne sais pas ce que je ferai dans dix, quinze ans », lance spontanément Camille
Aoustin. Entraîner, peut-être. « J'aime le terrain, je garde le coaching dans un coin de ma tête. » Parce que dans le présent, l'active Cherbourgeoise est déjà fort occupée. Et parce qu'elle sait, aussi, quelle place sera la sienne le 1er juillet prochain. Celle de manageuse générale du Sambre Avesnois HB, le promu qu'elle a rejoint – sans trop le connaître, avoue-t-elle – il y a deux ans.
En une vingtaine de mois, la maison rose-mauve n'a plus aucun secret pour l'ailière gauche. « J'ai mis six mois pour me mettre dans le bain. J'étais chargée du développement commercial, sur les partenaires, le marketing. Il fallait professionnaliser tout cela. » A un moment charnière où, cahier des charges et montée en gamme obligent, les rencontres à domicile migraient de l'iconique salle Lempereur, à Aulnoye/Aymeries, vers le Coubertin de Maubeuge, à quelque dix kilomètres. Suite au départ en Roumanie de Clément Petit, entraîneur de la montée en LBE et manager général, « mes missions se sont élargies ». Adoubée par les dirigeants, la nouvelle chargée de développement économique « commence à prendre plus de poids au niveau territorial, avec les politiques, la gestion externe. J'arrive aujourd'hui à être quasiment sur tous les postes, jusqu'aux ressources humaines. »
La chronologie, un CV à elle seule, valide ce pourquoi la double championne de France (2016 et 2017) a quitté Besançon pour un pensionnaire de D2. Le début du commencement d'une transition professionnelle. En 2023, « je suis arrivée avec l'idée de mener un double projet. Mon ambition principale était d'intégrer le CDES (Centre de droit et d'économie du sport) de Limoges, après mon master en management du sport. Je voulais me perfectionner, dans l'optique de devenir manageuse générale. Sambre Avesnois m'a offert l'opportunité de mettre le pied à l'étrier, en ayant des missions concrètes. » Le projet initial partait également d'un constat : « Alors qu'on peut avoir beaucoup de coaches féminines, les personnes qui nous encadrent, déterminent comment un club doit évoluer, définir ce dont ont besoin les joueuses, sont des hommes. Comme je suis une femme de défis, je me suis dit ''Pourquoi pas moi ?'' »
Manches retroussées jusqu'aux épaules, Camille Aoustin (35 ans) vit, agit, en trois dimensions. La compétition, sa priorité tant que sa fin de carrière ne sera pas officialisée ; les études au CDES, comportant des séminaires de formation « dans des gros clubs, des grosses fédérations » toutes les six semaines ; le fonctionnement quotidien d'un club pro. La face souvent cachée de la balle collante, objet de fascination depuis toujours. « Même avant de m'intéresser au handball, j'étais passionnée par le travail effectué par les clubs qui se développent, qui proposent des expériences à part aux spectateurs », tous sports collectifs confondus. En dix-sept ans de haut niveau, elle en a ausculté un panel représentatif : « des clubs historiques comme Metz (2015-17), avec un fonctionnement reconnu ; un club en développement capable de gagner des titres, comme j'ai pu le faire à Siofok (Hongrie, 2017-21, vainqueur de la Coupe EHF 2019) ; un club historique qui continue à chercher d'exister dans le paysage féminin avec Besançon (2021-23) ; un club de D2 qui cherche à se professionnaliser, etc. Dans la construction du projet, c'est hyper bénéfique. »
« En terme d'heures, je travaille beaucoup plus pour le SAHB que je ne fais de handball, confesse encore celle pour qui tout commença à la JS Cherbourg (2003). Chaque activité demande une énergie différente. L'énergie physique, c'est sur le terrain. J'ai la possibilité, avec mon expérience, de pouvoir gérer mon corps, mes efforts. Au travail, la charge mentale est plus forte. Je suis constamment confrontée à la pression, aux enjeux. J'ai dû l'appréhender. La partie scolaire, c'est très intense quand je suis en séminaire. C'est un équilibre à trouver, je pense l'avoir trouvé. »
Comme le promu trouve, en écho, sa place dans l'élite... A six journées de l'arrivée, Sambre Avesnois (douzième de LBE) compte respectivement quatre et sept points d'avance sur Mérignac, l'avant-dernier, et Toulon, lanterne rouge. Malgré un match de plus que ses poursuivants, qu'il rencontrera à tour de rôle en dernière semaine, la probabilité d'une saison 2 est très élevée. Créditée de 2,5 buts de moyenne, Aoustin tire dans ce sens. « On vit une saison assez sereine pour un promu. Notre bon début de saison (trois victoires d'affilée) nous permet d'avoir un petit matelas. On est dans les clous parce qu'on a su gagner des matches face à nos concurrents directs. La saison aurait pu être encore plus simple, car on n'arrive pas à faire de grosses performances. » Un axe de progression, de développement, sur lequel la future manageuse générale ne manquera pas de plancher.