Au courage mais dans la douleur !
Euro
jeudi 18 janvier 2024 - © Yves Michel
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Dynamisée par la prestation de son gardien Dominik Kuzmanovic (13 arrêts), la Croatie a cru jusqu'au bout qu'elle pourrait (enfin) battre les Français après cinq années de disette. Mais c'est au courage et à l'abnégation que les Bleus se sont imposés (34-32). Ils ont dû livrer un véritable combat dans une rencontre où ils ont été mis en difficulté. Ils ne se sont jamais affolés et ont trouvé les solutions aux moments-clé. La France poursuit son sans faute sur l'Euro... place désormais à l'Islande !
Voilà cinq ans qu’ils essaient de les dompter sans pouvoir y parvenir. Pourtant la dernière fois, la Lanxess Arena les avait inspirés. C’est à Cologne, un 23 janvier 2019 dans le tour principal d’un… Mondial que les Croates avaient mis fin à une série de sept défaites consécutives face aux Bleus. Et ce jeudi, une nouvelle fois, ils ont bien cru que la pièce allait rebondir du bon côté. Portés notamment par la prestation de qualité de Dominik Kuzmanovic (photo ci-dessous). Pendant plus d’une mi-temps, le gardien du RK Nexe s’est retrouvé en apesanteur, maintenant son équipe au contact quand elle avait perdu pied, faisant même douter les Français quand ceux-ci pensaient avoir accompli le plus difficile. Mais les treize arrêts du ‘’gamin’’ de 21 ans n’ont pas suffi pour renverser la situation. La profondeur du banc français a payé en fin de rencontre. Samir Bellahcène jusque-là peu productif tout comme Rémi Desbonnet avant lui, s’est interposé quand il le fallait, Nicolas Tournat lui, n’a pas failli lorsque dans les toutes dernières secondes, il a préservé l’avance tricolore. Les responsabilités du pivot de Kielce étaient bien plus importantes qu’à l’accoutumée, aux deux extrémités, après notamment, l’exclusion définitive à vingt minutes du terme ( !) d’un Ludovic Fabregas toujours aussi précieux.
Dans ce type de rencontre, le moindre détail a son importance et les joueurs des Balkans n’avaient pas l’intention de subir. Ils vont attaquer pied sur l’accélérateur, profitant aussi, d’un flottement dans la défense tricolore. Ils vont même réussir à la pousser à la faute avec très vite une double supériorité numérique. A l’inverse, le travail de dissuasion du bloc central croate était plus efficace. Cette tendance de vouloir asphyxier les Français va faire long feu. Et c’est Nikola Karabatic qui en personne va sonner la révolte. Comme il l’avait fait deux jours plus tôt face aux Allemands. Il va encore une fois s’investir dans la récupération, dans le jeu sans ballon, dans la fixation mais aussi en soignant ses trajectoires et en marquant. C’est lui qui va permettre aux siens (enfin) de passer en tête (8-7 à la 12ème). C’est encore lui qui, bien servi par Dika Mem, d’un tir croisé va concrétiser un écart de +3. Une avance de courte durée car par excès de précipitation, d’impatience, l'actif sera dilapidé. Matej Mandic qui avait démarré dans la cage croate, n’avait pas été décisif. Il sera donc judicieusement remplacé par Kuzmanovic, prolifique dès son entrée face à Karl Konan, Elohim Prandi ou Melvyn Richardson. Et le scénario va prendre une tournure différente. La Croatie était revenue à hauteur et elle va y rester jusqu’à la pause (18-18).
A la reprise, comme pour se rassurer face à la feuille blanche, Samir Bellahcène était à la parade. La 1ère pour le gardien de Kiel. Mais la France va connaître du déchet dans la finition. Dans le jeu placé mais aussi en contre-attaque. L’efficacité au tir n’était pas satisfaisante. Et surtout, Kuzmanovic avait remis le couvert. Les Tricolores vont mettre un peu plus d’intensité et le score va nettement basculer en leur faveur. Grâce notamment à Nikola Karabatic, auteur à ce moment-là (44ème) de son 289ème but dans un championnat d’Europe. Record absolu puisqu’il devance désormais l’ancien lauréat, l’Islandais Valur Sigurdsson qui a arrêté sa carrière au PSG en 2020. Avec 4 longueurs de mieux (26-22) et même s’il restait un quart d’heure à avaler, cela se présentait plutôt bien pour les Bleus. Mais encore une fois, ils vont retomber dans les travers qui leur avaient porté préjudice, offrant des ballons à des Croates qui n’en demandaient pas tant. Kuzmanovic, encore lui, était toujours en état de grâce, suffisamment pour relancer le suspens. Il faudra un intermède provoqué dans les tribunes par des énergumènes affublées du maillot à damiers pour que le jeu soit arrêté. Les deux équipes vont jouer avec les nerfs de leurs supporters. Les Bleus avaient remis de la distance (+3) mais à moins d’une minute, le pivot de Limoges Tomislav Kusan ramenait la Croatie au plus près (33-32). Il faudra toute la détermination de Nicolas Tournat pour que l’histoire se termine bien.
Quatrième match et quatrième succès pour les Français dans cet Euro et même si tout n’a pas été parfait (loin de là), ils restent plus que jamais en position de force pour atteindre le carré final. Un jour de répit et samedi, ils retrouveront l’Islande qui dans la confrontation de la soirée a été battue par l'Allemagne (26-24). Les joueurs du grand Nord n'ont désormais aucune chance d'aller en demi-finale.
Lanxess Arena (Cologne), jeudi 18 janvier 2024, Groupe I Tour Principal France - Croatie 34 – 32 (MT : 18-18) Spectateurs : 19 750 Arbitres : Lars Jorum & Kavard Kleven (Norvège) Evolution du score : 2-3 (5) 5-7 (10) 10-8 (15) 14-11 (20) 17-15 (25) 18-18 (MT) 21-20 (35) 24-21 (40) 26-22 (45) 27-25 (50) 31-28 (55) 34-32 (FIN) France : Desbonnet (2 ar./14), Bellahcène (6 ar./25) – Lenne (3/4), Remili (3/5), Prandi (1/3), Richardson (0/2), Mem (6/11), Tournat (4/5), Karabatic N. (5/7), Mahé (2/2), Karabatic L. (1/2), Fabregas (3/3), Descat (3/5), Porte (1/1), Nahi (2/3), Konan (0/1)
Les Réactions chez les Bleus.... Guillaume Gille : "Ça a été un match très disputé, où on n’arrive pas forcément à dominer notre adversaire, notamment à cause de la prestation de son gardien. Ce que je retiens, c’est que cela a été moins maitrisé que face à l’Allemagne mais parce que les Croates font un match très solide. On a vu un peu de crispation sur la fin, mais on est capable de mettre des buts importants, notamment en allant jouer autour de Nicolas Tournat. Ca nous fait deux points, une entrée parfaite dans le tour principal mais il va falloir vite basculer sur la suite. Nikola Karabatic bat le record, mais je ne sais pas ce qu’on peut ajouter à ce qui a été déjà été dit. Sa 350ème sélection, il y a quelques semaines, était déjà un beau clin d’oeil. Ce garçon est en tête de tellement de classements, de tellement de palmarès que ça en devient fou. Mais ça montre l’impact qu’il a eu sur l’histoire de notre sport."
Nikola Karabatic : "Ma mère m’a mis la pression il y a deux jours, elle m’a appelé en me disant qu’il fallait absolument que je batte le record et qu’il ne me restait que huit buts à marquer. Je lui ai dit que je faisais plein d’autres trucs sur le terrain, des passes et des défenses, mais elle a bien insisté. Après, c’est arrivé et c’est tant mieux. Mais je retiens surtout notre victoire, le fait qu’on se soit arraché tous ensemble, pour aller la chercher. Les records, c’est cool, j’ai couru après ce genre de choses toute ma vie, mais ce soir, c’est un peu anecdotique. D’autant plus que je sais qu’un jour ou l’autre, quelqu’un finira bien par le battre."
Yanis Lenne : "C’est toujours compliqué de revenir de blessure et de trouver ses repères tout de suite, on l’a vu pour moi contre l’Allemagne. J’ai l’impression que, ce soir, ma compétition a vraiment commencé. Je suis content d’être vraiment entré dedans. J’ai senti l’équipe un peu nerveuse par moments, mais on a aussi montré une forme de maturité en étant capable de nous recentrer, sans paniquer. Il va vraiment falloir vite se recentrer sur la suite, même si c’est toujours positif de garder la bonne dynamique."
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