Et au sixième match, le bel ordonnancement norvégien se mit à buguer... Et pas qu'un peu. Les serveurs informatiques du Spektrum ont bien ramé en fin de première période, rechignant à enregistrer l'exclusion temporaire d'Hovden qui avait envoyé un tir dans le visage de Laura Glauser (27ème), puis un but égalisateur de Deila (11-11). Pour le coup, la mi-temps aurait pu être sifflée trois minutes en avance, le temps de tout réinitialiser...
Des ratés, la sélection championne du monde en titre en a sans doute connu plus en un dimanche soir à Trondheim que dans ses cinq matches précédents. Seule l'entame, le 3-0 initial passé en moins de trois minutes à des Françaises qui se cherchaient encore (5 échecs de suite au tir), a rappelé à la troupe de Thorir Hergeirsson son début de parcours dans la soie. Songez que jusqu'alors, la Norvège s'était toujours imposée par au moins dix buts d'écart (face à la Corée du Sud, dimanche dernier) et marqué minimum 33 buts (dans cette même rencontre du premier tour).
Mais ça, c'était avant d'être sortie de sa zone de confort par son contradicteur préféré depuis près d'un quart de siècle. De rendre 13 ballons à cette équipe de France en capacité de résister à des impacts plus gros qu'une pièce de dix couronnes, y compris en seconde période. Une grosse différence par rapport à la finale mondiale 2021 et à la demi-finale de l'Euro 2022, perdues au retour des vestiaires.
Il n'y a d'ailleurs plus eu de véritable temps faible bleu une fois que les Laura se sont mises en action. Glauser, pour une première parade face à Herrem (5ème), et Flippes, pour ouvrir le compteur buts (1-3, 6ème). Les tiroirs de la défense 0-6 se sont ouverts à tout bout de champ, limitant le champ d'action de la base arrière adverse (Reistad, S. Oftedal, N. Mørk) et contraignant les tenantes du titre à commettre des impairs inhabituels en attaque placée. Le dispositif a même empêché ces dernières de déployer le jeu de transition si redoutable en temps normal.
Si en pourcentage, l'attaque française a moins performé que celle des Scandinaves (50 % contre 58 %), l'impression visuelle est autre. Face aux références que sont Silje Solberg et Katrine Lunde, le jump d'Orlane Kanor encore en apesanteur au surlendemain de son 7/7 face aux Sud-Coréennes, l'habileté à six mètres de Sarah Bouktit, la lucidité de Chloé Valentini quel que soit le degré d'angle ont montré que des solutions existaient. Grace Zaadi et Estelle Nze Minko sont allées provoquer les duels, Léna Grandveau a continué de se montrer très entreprenante en phase offensive. La Nantaise, dont la candidature au titre de meilleur espoir du tournoi prend chaque jour plus d'épaisseur, n'a pas non plus hésité à protéger le ballon convoité par Reistad, et à obtenir un passage en force. Quand la valeur n'attend ni le nombre des arrêts, ni celui des sélections...
Ce France – Norvège était donc beau comme le huitième de finale qu'il n'était pas. « Seulement » un dernier match de groupes dont l'unique enjeu était de savoir qui finirait premier, qui terminerait deuxième, et qui irait où dans le tableau final du Mondial. Un Classique très disputé, plus indécis qu'un match amical de juillet hors fenêtre internationale, dans lequel les Bleues ont compté au mieux trois buts d'avance (17-14, 39ème). A trois minutes du terme, alors que Flippes était montée en tribune (3x2 minutes), elles étaient à nouveau doublées, promises à affronter les Pays-Bas (vainqueur du groupe 4) en quart de finale, suite à l'une des rares coups de serpe de Reistad à 9 mètres (22-23).
Le coup de collier décisif a été donné, et c'est symbolique au vu de sa prestation (6/8, 3 passes décisives), par Nze Minko. La capitaine a suivi à la lettre la consigne de son coach durant l'ultime temps mort : recevoir la balle d'Orlane Kanor positionnée demi-centre, résister à Ingstad jusqu'à l'arc des 6 mètres et faire 24-23. Un résultat préservé par Laura Glauser, dont la dixième et dernière parade, à l'aile devant Skogrand, assure victoire et pole aux Françaises. Reçues six sur six, les voilà fin prêtes à affronter la République Tchèque, dauphine des Néerlandaises dans le groupe qui croise, mardi (17h30). En conservant ce sérieux, cette force collective qui semble aller crescendo, la cité danoise d'Herning et son dernier carré ne devraient pas être bien loin...
FRANCE – NORVEGE : 24-23 (12-12)
Dimanche 10 décembre 2023, à Trondheim. 6754 spectateurs. Arbitres : A. et D. Konjicanin
(BOS).
Evolution du score : 0-3 (5') ; 5-6 (10') ; 6-7 (15') ; 8-7 (20') ; 10-9 (25') 12-12 (MT) 14-14 (35') ; 18-15 (40') ; 19-19 (45') ; 21-20 (50') 21-21 (55') 24-23 (FIN)
La réaction d'Olivier Krumbholz : "On est très heureux, ça a été un grand match de handball entre deux équipes proches l’une de l’autre. Il n’y a jamais eu plus de trois buts d’écart entre les deux, donc c’est pour dire l’intensité. On a bien géré la fin de la rencontre, on a perdu très peu de ballons. En début de match, on a eu un peu peur mais on est parvenu à arrêter l’hémorragie. Vraiment, j’ai envie de retenir la défense qu’on a produite, avec beaucoup d’étagement et d’agressivité. Tamara fait un très grand match, Orlane aussi en attaque, elle a été notre bras en attaque placée. On voulait finir premiers, forcément, mais on a énormément de respect pour la République Tchèque. On a la confirmation de notre potentiel et on peut même dire qu’on prend date, pour les quarts peut-être, pour les demies aussi, mais surtout pour plus tard."