Une journée comme les autres, vraiment, ce mercredi 30 août ? A zyeuter l’emploi du temps de Margaux Imhof, affirmatif. « C’est important de garder sa routine personnelle, de ne pas changer ses habitudes, même si on monte d’un niveau », raisonne l’ailière gauche d’Achenheim/Truchtersheim, entité qui a pris Strasbourg en préfixe cet été.
Mais impossible d’occulter totalement l’événement qui nous amène à son domicile de la métropole alsacienne. La réception de Nantes, historique rien qu’en l’écrivant. Pour la première fois, le (S)ATH, rompu aux divisions inférieures (champion 2013 et 2018 de N1, six ans de D2), évolue au plus haut niveau. « On avait hâte de jouer ce premier match de championnat. On l’attendait depuis qu’on avait commencé la préparation », le 18 juillet. Alors, des révisions de dernière minute rognent la normalité : « Chacune regarde, plus précisément, les joueuses (adverses) à son poste. En face de moi, j’ai Vollebregt. Une ailière droit (néerlandaise) qui court, est efficace à la finition. Ce sera important de courir, de tenir sur la longueur, sachant qu’elle est toute seule à son poste. »
L’horloge tourne, fini de potasser. La numéro 72 (22 ans le 4 octobre) et sa colocataire gardienne de but, Léa Fargues, se rendent ensemble au centre d'examen. Deux heures moins le quart avant le coup d’envoi, personne ne manque au Kochersberg, la salle emblématique de Truchtersheim, à une petite vingtaine de kilomètres de la place Kléber. Ni les principales architectes de la montée, ni les quatre recrues (Loureiro, Maurin, Plée, Vlug). « Dès qu’on arrive, on discute toutes, tranquillement. » Du classique, encore. Comme le speech de Jan Basny, à 18 h pile. « Pour les derniers réglages, nous rappeler qu’on est aussi là pour se faire plaisir, que c’est du sport. Il nous enlève la pression. » L’entraîneur tchèque, troisième saison en Alsace comme notre grand témoin, « revient dans le vestiaire avant l’échauffement, à peu près une heure avant le match, et juste avant, quand l’autre équipe est appelée. »
« Vivre de sa passion, c'est une chance »
Le reste du temps, le collectif se conditionne en autonomie. « Il y a la collation, la promenade. C’est toujours la même organisation. » La révolution attendra. Celles qui connaissent du monde dans le camp d’en face lancent la conversation. « Quand on se retrouve toutes ensemble dans le vestiaire, douze minutes avant le début du match, la pression monte un peu. Mais je pense que c’est une bonne pression. » A ce moment précis, Margaux Imhof sent en elle un accomplissement intérieur. Devient réellement ce qu’elle voulait être, ce pour quoi elle a lâché récemment ses études de gestion. Une joueuse pro. « Ca me plaît, ça me change forcément. L'année dernière, j'étais encore en études. Tous les jours, je vis de ma passion. On peut dire qu'on est fatiguée, mais quand on y réfléchit, c'est une chance de vivre ça. »
20 heures. L'ailière est entrée dans sa bulle de concentration. MM. Kentzinger et Garbellini donnent le coup d’envoi... qui semble anesthésier le vice-champion de D2. Lequel ne marque que trois fois en 14 minutes. Le temps mort pris dès la septième minute (2-7) n’infléchit pas la tendance lourde, clairement favorable à Nantes, troisième du défunt championnat et outsider pour le titre (3-13, 15’). Bienvenue en LBE... « Les Nantaises étaient prêtes, voulaient montrer qui elles étaient, c’est normal. Peut-être que cela nous a peut-être surpris. »
L’approche de la pause atténue l’effet de sidération. Alors qu’Imhof avait été relayée par son binôme, Eve Barlet, Achenheim rentre au vestiaire sur un 5-1. Impulsé par la MVP 2022-2023 de D2, Dalila Abdesselam (10/17 hier), et Sarah Muller (9-19, 26’ puis 14-20, 30’). « A la mi-temps, il y a toujours quelques minutes où Jan n'est pas avec nous. On se retrouve entre nous, sans les gardiennes », restées travailler sur le terrain. « On a essayé de se remobiliser, de se dire qu'on sait jouer au handball, qu'on peut y arriver. L'écart n'était pas si énorme que ça. On s'est donné des conseils sur tous les postes. Quand il est revenu, Jan nous en a donné en défense. »
Le quart d'heure d'introspection, d'autocritique, a été bénéfique. En premier lieu à la native d'Epinal (22 ans le 4 octobre), qui enquille huit buts en huit tentatives (dont cinq penaltys) et 25 minutes. « L’équipe a peut-être compris qu’il fallait jouer un peu sur les extérieurs, et pas qu’au centre, où la défense (nantaise) était très bonne. »
« On va progresser de match en match »
Dans son sillage, le promu limite les dégâts. Fait jeu égal, dans la seconde demi-heure, avec le nouveau club d’Hélène Fauske et Marie-Hélène Sajka (6 buts chacune). S’incline finalement 34-41, non sans avoir réussi à passer plus de 30 buts à une défense ligérienne qui affichait 25,7 de moyenne la saison dernière. « On a réussi à ne pas baisser la tête, à essayer de jouer notre jeu. Il faut absolument retenir l’esprit d’équipe de ce match-là. »
L’esprit de camaraderie, de convivialité, ne s’est pas évaporé dans l’atmosphère, aseptisée par endroits, de l’élite. Deux bonnes heures après le buzzer final, Margaux Imhof débriefe encore, à l'espace VIP déjà en place en D2. « Le club a toujours été proche de ses partenaires, du public. Comme l'année dernière, on parle avec beaucoup de personnes après les matches. C'est important. » Pour quel ressenti ? « Malgré la défaite, le public (750 spectateurs environ) était content de notre prestation. Même à -10, il continuait à nous encourager. C'est important de lui redonner ça. »
Quand la Vosgienne rentre enfin chez elle, il est déjà jeudi. L'avant-veille de la deuxième journée, pour laquelle Achenheim est attendu à Toulon. L'un des plus longs déplacements de la saison, qui nécessite de prendre le TGV de la mi-journée – et sa correspondance – vendredi. Une séance vidéo et deux entraînements sont programmés en amont. « Il faudra rentrer directement dans le match, être plus rigoureuses, perdre moins de ballons, être efficaces au maximum. Nous sommes une équipe capable d'apprendre de ses erreurs. On va progresser de match en match. »