Une fois n'est pas coutume, Captain Sensible s'est tu, mercredi aux Arènes de Metz. Le refrain le plus célèbre de ce chanteur rock britannique des eighties, « He said captain, he said wot », n'a ponctué aucune des bonnes actions d'Astride N'Gouan contre Mérignac, comme ça arrive parfois. Dommage, car il y avait matière à jouer la virgule musicale personnalisée. En ouvrant le score sur une seconde chance à six mètres, en obtenant le penalty du 4-0 converti par Tjasa Stanko, la porteuse du brassard en Moselle a donné le tempo d'une soirée sans accroc pour son collectif, qui a frigorifié l'avant-dernier de la phase aller. Le mercure girondin est descendu à -5 après six minutes, -12 après trente (18-6), -19 après une heure (35-16).
« On a été sérieuses du début à la fin, que ce soit en défense ou en attaque. Tout le monde a eu son temps de jeu », retient la pivot, qui a partagé le sien avec Yvette Broch (Olga Perederiy a été laissée au repos). Un franc sourire éclaire son commentaire. Le même qu'à l'échauffement, quand l'ancienne Toulonnaise devisait quelques instants avec Sanne Van Olphen, son équipière dans le Var en 2015-2016. Le ravissement, aussi, d'acquérir sans peine une douzième victoire en treize journées régulières de LBE. Metz en est toujours le leader provisoire, et pourrait finir la demi-saison en tête si Brest ne gagne pas son dernier match ajourné, mercredi prochain à Plan-de-Cuques.
Mayonnade : « Un potentiel offensif de Top 5 mondial »
Sur son arc de prédilection, Astride N'Gouan sait se faire respecter. Par son physique (1,87 m), par sa capacité à bonifier les offrandes de ses arrières ou des demi-centres. A son poste, « offensivement, elle a un potentiel de Top 5 mondial », encense son coach en club, Emmanuel Mayonnade. « C'est très dur de la contourner, de lui prendre la balle. En plus, elle a beaucoup gagné en mobilité. Elle a beaucoup progressé, dans sa prise de balle, dans sa vision et sa perception des choses, dans l'exigence qu'elle a avec elle-même. »
Une rigueur, un professionnalisme qui poussent même la Dionysienne à piloter sa défense en distanciel. Face à Mérignac, peu avant de revenir jouer le dernier quart d'heure, c'est elle qui donnait les consignes, haranguait son camp, depuis le banc. « On a besoin de tout le monde, que toutes se sentent concernées. C'est vraiment important », se justifie-t-elle. Preuve que la joueuse formée à Issy-les-Moulineaux assume pleinement son capitanat, attribué en début de saison à la suite du départ de sa copine Grace Zaadi à Rostov (les jeunes femmes étaient colocataires dans le huis clos hôtelier d'Herning, pendant l'Euro en décembre).
Il en sera de nouveau ainsi samedi (16 h), quand Metz recevra Bucarest dans l'affiche de Ligue des Champions qui déterminera son classement final avant le huitième de finale, devenu obligatoire du jour au lendemain. « Il nous reste un dernier gros match. On va tout donner, jouer de la première à la dernière seconde. On verra le résultat à la fin. » La championne du monde 2017, et d'Europe 2018, l'espère naturellement plus favorable que celui du précédent match de C1 à domicile (28-29 face à Kristiansand, le 3 février), qui avait brisé la fameuse invincibilité aux Arènes de 28 rencontres en quatre ans. Si les larmes ont eu le temps de sécher, notamment grâce au succès à Bietigheim le week-end passé (25-33), « ça reste quand même dans un coin de la tête, pour montrer que si on n'est pas assez concentrées, on peut perdre des matches, et on n'a plus envie de revivre ça. »
« Je n'ai pas hésité à rester » une saison de plus
Des saisons à Metz, Astride N'Gouan en a déjà vécu une entière, conclue sur un doublé championnat-coupe et un Final Four européen. La deuxième a été écourtée pour la raison que vous savez, la troisième est en cours. Elle en connaîtra une quatrième, puisque la prolongation jusqu'en 2022 a été actée mi-janvier. « Quand on te propose de rester à Metz, tu n'hésites pas, lance-t-elle. J'ai eu d'autres propositions, c'est vrai, mais je n'ai pas hésité à rester. Je suis bien ici. » Emmanuel Mayonnade opine : « Il fallait qu'Astride puisse continuer avec nous, parce que tout le monde le méritait. C'était un deal important avec mon président. » Mais l'accord comprenait-il une clause stipulant de diffuser au moins une fois par match « He said captain... » ?