Les arrières latérales
Longtemps pointées du doigt comme inefficaces aux tirs de loin, les arrières tricolores sont de plus en plus dangereuses à mi-distance. De plus, la diversité de leur mode de jeu fait que la défense adverse doit en permanence s’adapter au gré des changements initiés par Olivier Krumbholz. Autre nouveauté, leur envie de pousser la balle aux ailes en attaque placée. C’est de plus en plus évident et là aussi, ça complique diablement la tâche du bloc adverse et ouvre mécaniquement des espaces pour elles et leur jambes de feu pour beaucoup.
Tout simplement la meilleure
Estelle Nze Minko : On a souvent décrié les élections du All Star Team avant la finale, mais en désignant Estelle Nze Minko MVP de l’Euro, il n’y a pas eu tromperie, loin de là. Dans cet Euro, la joueuse de Györ aura tout fait. Buteuse (26 buts), passeuse (12), intercepteuse (9), elle a coché toutes les cases aussi bien en attaque qu’en défense. Un peu plus à la peine sur jeu placée quand en face on a une 6-0 bien tankée sur les 6 mètres avec du gabarit partout. Elle a, dans ces cas-là, basculé sur le jeu sur grand espace où elle est la reine absolue avec sa vitesse, sa détente et sa vista. Elle rechigne à prendre du tir à mi-distance, et pourtant elle est loin d’être maladroite dans le domaine avec un jump qui lui permet de bien lire les options de tir possibles. Mais là où elle a bluffé tout le monde, c’est en défense sur la 5-1 simple ou décalée. Sur la demie et la finale, elle a tué l’attaque adverse à chaque fois ! Voir une joueuse comme Stine Oftedal reculer à mi-terrain pour avoir un peu d ‘air face à elle. Du grand art quand on connaît la valeur de la demi-centre norvégienne. Quant à Camilla Micijevic, elle a disparu dans les limbes de la Jyske Bank Boxen en demi-finale. Ce mix défense – attaque en fait clairement la joueuse la plus complète de l’Euro devant quand même de sacrées pointures.
Enfin libérée ?
Kalidiatou Niakate : Des débuts compliqués, pour ne pas dire pire… Mais une fin de compétition… Attention les yeux, ça a déménagé ! Le tour préliminaire a été à la limite de l’indigent, au point qu’Olivier Krumbholz a fait passer Grâce Zaadi en 2° solution sur le poste d’arrière gauche. Le tour principal a été déjà beaucoup plus cohérent, même avec l’entrée d’Orlane Kanor comme 3° option de retour de sa blessure au dos. L’Espagne avait tâté de sa puissance, la Suède a coulé sous ses coups de boutoirs au retour des vestiaires. Elle a remis le couvert en demi-finale et mis à mal la Norvège en finale. On a eu l’impression que plus c’était dur, plus c’était facile pour la Brestoise. En tous cas, on a revu l’arrière inarrêtable du BBH sur la fin de compétition et on espère que ce sera le grand déclic pour elle. Après on ne sait pas ce qu’il serait advenu si Orlane Kanor n’avait pas eu de problèmes au dos puis au genou. Mais que ce soit au tir de loin, en pénétration ou en dézonant et défensivement, Kalidiatou Niakate a montré qu’elle avait tout en magasin pour le très haut niveau.
On attend son éclosion
Orlane Kanor : Arrivée blessée au dos au Danemark, la Messine n’a semble-t-il jamais réussi a retrouver toutes ses capacités. Pourtant, après une première apparition encourageante face à l’Espagne, face au Danemark on pensait que tout était reparti, et le match contre la Suède confirmait ce constat. Malheureusement, un coup au genou lui a stoppé net son élan et sur les deux derniers matches , elle n’a joué que les utilités, laissant Kalidiatou Niakate épauler au mieux Estelle Nze Minko. Pourtant son talent est sans doute un des plus grands chez les Bleues. Capable de tout faire, un jump qui l’a propulsée en haut des lignes de stats de l’Euro avec 73 cm de détente SVP… Un bras fait de vitesse et de puissance avec en plus une capacité à prendre les espaces si cela monte un peu haut pour aller la contrer. Tout cela on sait qu’elle est capable de le faire, et même à très haut niveau. Hors blessure, il lui reste à trouver de la stabilité dans son jeu. Un peu comme son amie de toujours, Méline Nocandy. Trouver la bonne alchimie pour devenir ce qu’elle doit devenir : Une candidate au titre de meilleur joueuse du monde un jour.
La taulière du terrain
Alexandra Lacrabère : Très (trop) longtemps estampillée seul bras capable de trouver des solutions de loin, la gauchère de Pau a totalement mué dans son jeu. Exit le danger lointain. Elle est encore capable d’en claquer un de temps en temps, mais avec les Niakate, Kanor, Kouyaté et autre Zaadi maintenant, elle a autour d’elle de la shooteuse sur pied et de la performante. Alors elle se mue en joueuse d’impact en oubliant un peu les courses en crabe en dézonant qui ne surprenaient plus beaucoup. Très bonne passeuse au pivot, capable de jouer parfaitement le jeu de transition avec son ailière, dont un jeu à 7 contre 6 initié par Olivier Krumbholz sur cet Euro. Elle a tendance à oublier la dite ailière sur jeu placé, mais c’est l’apanage de la plupart des arrières gauchers… Par contre, endosser les responsabilités quand tout le monde regarde ses chaussures et plus personne ne veut aller au charbon, elle sait le faire et même très bien. C’est sans doute la reine du but sur jeu passif, ce qui montre son tempérament ! En plus sur cet Euro, elle y a ajouté une prestation défensive de premier ordre. Elle qui était cataloguée « porte de saloon » dans sa jeunesse, ça montre qu’à 33 ans, elle est encore dans la remise en question et l’envie de progresser constamment.
Une première qui en appelle d’autres
Océane Sercien Ugolin : Privée par deux fois sur blessure d’une compétition majeure, la gauchère de Ljubljana a enfin participé à une grande compétition. Et on a vu pourquoi Olivier Krumbholz avait persévéré à la sélectionner. Du jump, du tir, de la lucidité dans les relations avec le pivot, elle a montré beaucoup de progression, il semble que son exil slovène lui ait fait passer un palier. Généralement intronisée dans le 7 de départ, elle a souvent épuisé les blocs adverses avant de céder sa place à Alexandra Lacrabère, la taulière du poste. Auteure de prestations convaincantes face à la Slovénie et la Croatie, d’un très bon match face aux Russes, elle n’a pas su rester sur le même tempo tout au long de l’Euro. Sa première grande finale a été un peu compliquée à la finition et en défense… Peut-être son plafond de verre du moment, mais il est déjà diablement haut. Et puis avec sa progression, on peut s’attendre à la voir aborder les suivantes avec beaucoup plus de sérénité et d’assurance.
Un joker surprise
Aissatou Kouyaté : Dernière arrivée avec sa coéquipière bisontine Chloé Bouquet-Valentini, la grande gauchère de Clichy la Garenne a d’entrée marqué les esprits. Sa fin de match face au Monténégro a sans doute ôté une belle épine du pied aux Bleues en leur permettant de s’imposer sur le fil. Rien que pour cela, Aissatou Kouyaté a réussi sa première compétition internationale. Après elle est restée dans ce mode joker de fin de match avec de la réussite face à la Slovénie et la Suède, mais comme Océane Sercien Ugolin, le dernier week-end a été beaucoup plus compliqué. Face à la Croatie, elle est entrée alors que le match était plié et que les Bleues desserraient leur étreinte, pas forcément simple de briller dans ces conditions. La finale face à la Norvège a été un peu ratée aussi bien défensivement qu’offensivement… Là aussi, un niveau peut-être trop élevé pour une néophyte. Mais si tout cela est digéré au mieux, sa puissance, sa vitesse et son shoot plus que cohérent pourrait en faire un des atouts majeurs de l’équipe de France dans les saisons à venir.