Rendre au Havre sa grandeur. Tant que Washington n'impose pas des droits de douane sur les punchlines du commandeur en chef, la Maison Ciel et marine a le droit de donner l'accent américain à son projet. Actualiser la carte de Ligue féminine sans décret tonitruant, réintégrer une élite quittée il y a sept ans. Que cela prenne 24 heures, comme autant de journées de championnat cette saison, ou plus. Nantes et Clermont-Ferrand, les autres puissances de D2, contestent cette ambition autant qu'ils la partagent. Le conflit d'intérêts génère des sommets VAP âpres, dans lesquels le HAC sait imposer ses vues. « Collectivement, le match à Clermont (gagné 24-27) est une référence. On avait toutes performé », illustre Lisa Le
Merrer. C'était à la troisième journée, trois mois pile avant de neutraliser les Ligériennes (20-20, le 4 janvier).
Au sein de l'administration Tom Garnier, la gauchère de 23 ans a hérité d'un secrétariat hautement stratégique : montées de balle éclair et finition. Un portefeuille attribué sur l'unique critère des compétences. « Lisa a cette capacité à être présente sur grand espace. C'était le cas en début de saison. Ca l'est de plus en plus depuis janvier, notamment contre Le Pouzin (victoire 33-41, le 8 février) et Bergerac (29-22, le samedi suivant), où elle a beaucoup marqué (7 buts, puis 6), apprécie le tacticien. Ces derniers temps, elle a travaillé sur son tir, avancé sur l'aspect technique. On voit de vrais progrès. »
Sur l'aile droite séquano-maritime, la promotion se donne au mérite. Jennifer Vialatte partie à Lomme, « on avait la volonté de faire de Lisa la vraie numéro 1, explicite Garnier. C'est la première année où elle vit vraiment ce statut-là. Elle a dû l'appréhender en début de saison, avec un peu de pression liée à cela. Elle assume ce statut de mieux en mieux. Petit à petit, elle devient importante dans le jeu et la vie de l'équipe. »
Autre avantage, et non des moindres dans un ensemble à « l'identité normande » réaffirmée par le staff depuis un an et demi : le raccordement à la fibre départementale. « Je suis née au Havre, j'ai commencé à Gonfreville-l'Orcher, j'ai fait trois ans à Octeville », retrace la défenseure en coin. Enfant, elle vibrait pour le HAC de Frédéric Bougeant. Celui titré en Europe (Challenge Cup 2012), double vainqueur en Coupe de France (2006, 07), cinq fois vice-champion. « J'habitais à un quart d'heure du Havre. L'équipe a toujours été mon modèle, a construit mes années handball. Ma joueuse favorite à l'époque, c'était Makaan Tounkara. » La référence est devenue une intime. « C'est une amie de mes parents, mon agent aujourd'hui. » Le mimétisme avec l'illustre aînée a été poussé jusqu'à rejoindre Fleury-les-Aubrais en 2019. « Ce club a compté pour moi. J'y ai rencontré des joueuses de très haut niveau, qui sont en équipe de France aujourd'hui. Avec les croisés (ligaments rompus pendant cette période), j'ai appris sur moi-même. Mon mental, ma détermination se sont décuplés. »
L'entité pro loirétaine ayant déposé le bilan fin 2022, Lisa Le Merrer ne se voyait pas rebondir ailleurs que dans sa Normandie tant aimée. Dans le club où elle était entrée par la porte U18, et dont « elle connaît l'histoire, la représente », d'après son coach actuel. « Jouer dans l'équipe une du Havre aujourd'hui, c'est une fierté. Fouler ce terrain des Docks Océane où Makaan et d'autres ont joué avant moi, ç'a une saveur particulière. Se battre pour le maillot a une vraie signification, ici. Je me retrouve avec trois filles qui étaient au pôle espoirs avec moi, avec Juliette (Guerrier) qui y était avant nous. Il y a un vrai projet, c'est le niveau vers lequel je veux tendre. Le HAC, c'est le club avec lequel j'ai envie de faire le plus de choses. »
En haut de la to do list pour les dix matches restants, continuer à forer, forer, forer sans répit les défenses adverses. « Le danger arrive de chaque poste. On aime bien jouer vite, courir, trouver des solutions rapidement. On essaie de profiter des arrêts et relances des gardiennes pour marquer plus facilement », précise la troisième meilleure buteuse (3,3 de moyenne) de l'attaque la plus prolifique de la division. Ensuite, « être encore plus fortes en défense. C'est le vrai point à améliorer. On n'est que la huitième défense du championnat. » Au général, Le Merrer (sous contrat jusqu'en 2026) et sa bande sont troisièmes, à un point du duo de tête. « Monter en D1 avec l'équipe de ma ville, ce serait énorme. L'objectif de début de saison était le Top 5. Aujourd'hui, c'est le Top 3, incluant le Top 1. Si on fait une superbe deuxième partie de saison et qu'on monte, il n'y aura pas de refus. Si on ne monte pas, ce ne sera pas la fin du monde. La saison ne sera pas à jeter. » Fin de son discours sur l'état de l'union ciel et marine.
Le Havre – Vaulx-en-Velin (15ème journée de D2), samedi 1er mars à 20 h