Pour un collectif bâti dans l'urgence, c'est assez remarquable. Autorisé à descendre d'un seul étage à trois semaines de la rentrée, le Nantes Handball Féminin est la dernière équipe invaincue en D2. Cinq victoires, trois matches nuls, une troisième place à quatre points du leader Clermont-Ferrand. Un bilan intermédiaire quasi inespéré, six mois après la liquidation judiciaire de l'entité hand Neptunes, sacrifiée par le groupe immobilier qui en était l'actionnaire (*).
« On est partis d'une feuille blanche. Le 24 août, il y avait zéro staff et zéro joueuse sous contrat, plus aucun partenaire privé, retrace Camille Comte, qui a signé son contrat d'entraîneur le lendemain. Tant bien que mal, on a recomposé une équipe. Sept joueuses sur quatorze faisaient partie l'an dernier de l'effectif N1, qui a eu des difficultés à se maintenir. Deux sont au pôle espoirs. On a recruté Cécilia Errin (gardienne) et Eva Mbata (arrière droit championne du monde U20), de Noisy-le-Grand, et Dagui Assana, de Toulouse. En termes de niveau de jeu, l'équipe était très déséquilibrée. » D'où le renoncement volontaire aux montées de balle et aux rotations les premiers temps.
Qu'à cela ne tienne, ce NHF nouvelle formule, « 20 ans et demi » de moyenne d'âge, est bien né. Le mode survie enclenché, il n'a cédé qu'en poule de Coupe de France, à Chambray (LBE, 30-17) et contre Rennes (D2, 19-21). « Je m'attendais à ce qu'on perde des matches au début, confie l'ex-coach de Bourg-de-Péage. On a commencé à travailler avec cet effectif début septembre, dix jours avant le premier match à Bègles. J'expliquais au président (Pascal Gentil) qu'on ferait notre préparation estivale pendant l'automne. On s'en sort très bien, avec très peu d'enclenchements, une bonne dizaine de ballons en moins à jouer que les autres. On a construit autour d'une défense et d'une gardienne fortes. » L'arrière gauche Ylana Richard (20 ans), les pivots Assana (22) et Esther Pelenda (pas encore 18) se révèlent. La conquête du grand espace n'est maintenant plus taboue. Comme des objectifs rehaussés. « Pour l'instant, on est en course pour aller chercher un podium. » Et pourquoi pas plus, avec ce choc en retard contre Clermont programmé le 12 février, et un statut VAP acquis en appel fin août...
De l'ensemble arrivé troisième de LBE en mai 2024, vainqueur de Ligue européenne trois ans plus tôt, ne subsistent que la salle (Beaulieu), le mauve des maillots, et deux joueuses made in Loire-Atlantique : Naémi Ardouin (ailière gauche, 22 ans) et Orlane Ahanda. Doyenne de l'ensemble à 26 ans, l'arrière droit arrivée en 2011 au... Nantes Atlantique HB a vu partir neuf coéquipières sous l'orage d'été. Son temps de jeu n'a plus rien à voir avec ce qu'il pouvait être sous Helle Thomsen. « Orlane jouait le second rôle derrière Marie-Hélène Sajka l'an dernier, observe Comte. Elle se retrouve cadre, leader de l'équipe, avec un statut à assumer. Devoir performer pendant une heure, ce n'est pas simple, mais elle s'en sort bien. » La parole passe à la capitaine, vice-championne du monde avec les Bleues fin 2021 (5 sélections)...
Orlane, auriez-vous pu également quitter Nantes l'été dernier ?
J'avais l'opportunité de partir. Il y a eu du pour et du contre, une réflexion plutôt longue. Mais l'attachement au club était le plus fort. Ce qui m'a fait rester, c'est l'équipe qui s'est faite petit à petit, et la présence de coaches de qualité. Avec Camille Comte et Gaël (Robert, l'adjoint), on a commencé un travail qui se passait plutôt bien.
Estimez-vous, Naémi Ardouin et vous, faire le lien entre les Neptunes d'hier et le NHF d'aujourd'hui ?
On avance avec cette équipe. On a une réelle solidarité entre nous toutes, peut-être par ce qu'on a vécu. Pas mal de filles du centre ont intégré le groupe de D2, ont été dans la même situation que nous. Les filles de Noisy qui nous ont rejoint ont vécu exactement la même chose (rétrogradation en N1). D'autres joueuses se sont raccrochées à cette nouvelle identité qu'on est en train de créer.
Comment avez-vous endossé ce nouveau rôle de capitaine, donc de cadre ?
Ce sont des responsabilités différentes de ce que j'ai eu auparavant. Avant, je faisais partie des plus jeunes de l'équipe pro. Aujourd'hui, le rôle est inversé : je suis l'une de celles avec le plus d'expérience, la plus ancienne. C'est la première fois que cela m'arrive, et ça me plaît.
Huit matches de championnat sans défaite vous incitent-ils à viser la remontée directe ?
Je n'avais pas resigné pour jouer le bas de tableau en D2. Mon objectif, et je pense celui de toutes, c'était de se battre pour pouvoir potentiellement remonter. Le président s'est battu pour avoir le statut VAP, nous aussi. On fait un très beau parcours, il y a une très bonne cohésion dans le groupe. On y croit de plus en plus. Maintenant, toutes les équipes nous attendent de pied ferme. Il faut continuer à bien travailler.
Estimez-vous que la place de Nantes est en Ligue féminine ?
Je le souhaite pour le club. Nantes a toujours eu une place dans le handball, autant chez les garçons que chez les filles. Il nous faudra pour cela du soutien, du public et des collectivités.
(*) l'équipe de volley des Neptunes continue d'évoluer en D1 et en Ligue des Champions femmes. Son devenir est tout aussi incertain...
Nantes – Palente (onzième journée de D2), samedi 25 janvier (20 h)