Plus superstitieux que la moyenne, les coureurs cyclistes ont coutume d'épingler le dossard 13 à l'envers. Inenvisageable avec Marjorie Demunck. Etrangère aux pelotons, la Marseillaise qui aura 26 ans en mars érige le numéro de département des Bouches-du-Rhône en porte-bonheur. Elle l'arbore partout, sur tous ses maillots, en premier lieu le bleu ciel et jaune du voisin administratif. Le Toulon Métropole Var, où « ça se passe très bien » depuis son arrivée à l'été 2023, indépendamment du déficit de victoires.
En presque deux décennies de balle collante, l'arrière gauche en a vu bien d'autres. Sa passion ne s'est jamais diluée dans les méandres d'une carrière sinueuse, amorcée au CP, par simple envie de jouer comme son père. Repérée par Bourg-de-Péage lorsqu'elle y venait disputer les finalités zonales des Interpôles (trois victoires en quatre participations), celle qui s'est initiée à la Côte Bleue, sise à Ensues-la-Redonne (comme Manon Grimaud), a privilégié le centre de formation drômois à celui de Metz. Un contrat de deux ans sans déracinement total, c'était le must... L'invitation à jouer régulièrement plus haut qu'en Nationale 1, hors bouts de matches avec le groupe pro de Camille Comte, résonne plus tard comme une invitation aux voyages. Début 2020, Achenheim (D2) l'engage comme joker médical. Pige abrégée par l'irruption du Covid-19, au bout d'une demi-douzaine de matches. Demunck se déconfine à Sambre Avesnois, toujours dans l'antichambre. Monte d'un étage conjointement avec Celles-sur-Belle (2021), sans se douter que deux hernies discales et autant d'opérations lui tomberaient dessus à peine installée dans les Deux-Sèvres.
La camarade de promotion de Lucie Granier - « Je suis rentrée au pôle en même temps qu'elle, à 14 ans » -, des jumelles Puleri ou Julie Le Blévec au conservatoire PACA s'est relevée de tout. Les impondérables l'ont dotée d'une solide carapace. « Le hand est une école de la vie, m'a fait grandir en tant que personne. Je me suis accrochée à mon rêve », évoluer au plus haut niveau. « Quoi qu'il arrive, peu importe le chemin, j'étais persuadée que j'y arriverais. Quand on veut quelque chose, il ne faut jamais rien lâcher. »
Marjorie Demunck se démène en ce sens dans le championnat du maintien, pris en cours de route afin de se rétablir de la rupture du ligament d'une cheville. Une épreuve de plus... Crédité d'une victoire (contre Achenheim, 4ème journée) et d'un nul (Saint-Maur, 2ème journée), Toulon est avant-dernier de Ligue féminine (13 pts, un seul de plus que Saint-Amand-les-Eaux) à la veille de l'acte 10. « On vit toujours les meilleurs moments quand on gagne. Mais on a un groupe solide cette année. On ne se dessoude pas, on s'accroche chaque semaine pour mettre tous les éléments nécessaires pour aller chercher les victoires, même à l'arraché. »
Le meccano paraît plus simple à assembler en Coupe de France, dont l'ancien double vainqueur (2011, 12) jouera les quarts de finale. Moins la magie de l'élimination directe qu'une réaction d'orgueil immédiate, réflexion faite. « Notre match catastrophe à Nice (19-28, mercredi passé en LBE), nos quatre buts en première mi-temps étaient encore en travers de la gorge. On avait toutes énormément envie de faire une belle prestation, de prendre du plaisir. On avait un supplément d'âme. » Dont le souffle a renversé Chambray-les-Tours, mieux classé en championnat mais déforcé (30-32). « Ca nous rappelle le niveau de notre équipe, et qu'il ne faut pas baisser les bras. » Un vrai mantra.
Le coup réussi dans un match sec servira-t-il de déclic, de détonateur en affaires courantes ? La combative Provençale y croit. « On espère garder l'état d'esprit, l'agressivité contre Plan-de-Cuques. » Si proche de la cité phocéenne, le huitième du général (17 unités), mais paradoxalement absent du CV de l'arrière qui a connu Aix/Bouc adolescente. « Je ne sais pas pourquoi je n'y ai jamais joué. Peut-être que cela arrivera un jour. Je me laisse guider par la vie, on verra où tout ça me mène... »
Plan-de-Cuques – Toulon (9ème journée de LBE), mercredi 15 janvier (20 h)