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Faut-il sacrifier le soldat « Jeu à 7 » ?

International

lundi 15 mars 2021 - © François Dasriaux

 5 min 38 de lecture

Depuis les JO de Rio, le Handball se trouve dans une position assez délicate en termes de spectacle. L’instauration de la possibilité de jouer en supériorité numérique en attaque est en train de tuer tout le spectacle « Handball », limitant les innovations, réduisant les écarts et supprimant toute notion d’exploit individuel dans ce sport, par essence même, spectaculaire au possible.

 

Loin de là l’idée de crier haro sur le Portugal qui est sans doute l’équipe qui utilise le plus cette forme de jeu. Elle est autorisée, on est dans de la compétition à très haut niveau, tous les moyens légaux pour s’assurer la victoire sont donc bons à prendre. Il ne faut pas se tromper de combat, le Portugal n’a rien à se reprocher, pas plus que les joueurs du Qatar et le Qatar étaient à mettre au pilori en 2015 pour avoir bénéficié d’une règle bien trop laxiste de l’IHF sur les naturalisations. C’est la règle qui permet de faire, pas l’inverse… Les Portugais ont donc décroché leur ticket pour les JO de Tokyo en appliquant de façon presque parfaite cette tactique pendant toute la seconde période face aux Bleus. Les Croates sont out et que cela les fasse grincer des dents est compréhensible. En venir à accuser les Bleus de les avoir sciemment éliminés est plus cocasse si on s’en réfère au passé, mais bon, là aussi le débat n’est pas là.



Le débat est sur le spectacle pur et dur et à moins que tout ne change, c’est pour cela que les spectateurs et téléspectateurs vibrent pour un sport. Si on reste purement dans l’esprit nationaliste ou partisan, on donne de bien mauvaises odeurs au « supporterisme ». En réagissant à froid, si on enlève toute la dramaturgie du match France – Portugal, qui a vu un beau match de handball en seconde période hier ? Le jeu en supériorité numérique appauvrit totalement le spectacle. Il n’est fait que d’une seule phase : Les ailiers au point de corners qui ne toucheront la balle que pour tirer. Deux pivots sur les espaces 1-2 et 2-1 qui attendent la balle et proposent un bloc – débloc, voire un glissement sur 2-3 ou 3-2 potentiel. Et 3 arrières qui ne font qu’engagement – désengagement – réengagement pour trouver l’espace ou le joueur libre. Pour ceux qui ont entraîné ou entraînent encore, si ils le peuvent, une des séances de base pour les – de 13 pour leur apprendre le jeu en rupture et la lecture de jeu. En bref, on assiste à une séance de formation de jeunes jouée par des joueurs pros. Aucun enclenchement, aucun dépassement de fonction, aucun duel en 1x1, tout ce que font les magiciens du jeu, aucune initiative hors du schéma strict fait de passes sans même parfois bouger comme le font les Danois, piqués aux 9 mètres en attendant qu’un défenseur se désaligne pour jouer dans l’espace libéré. Bref, à regarder cela, on s’emm…. A 100 sous de l’heure. Même le handball féminin s’y met lui aussi, lui qui est un des derniers espaces de jeu collectif poussé et d’innovations tactiques. Esbjerg ayant joué ce type de jeu pendant 20 longues minutes en seconde période hier face à Brest en Ligue des Champions Féminine…



Car il ne faut pas se tromper non plus sur le pourquoi de la mise en place de ce type de jeu par les équipes. C’est avant tout pour niveler le jeu quand on est totalement à la rue face au niveau adverse. Là aussi l’histoire du Brest – Esbjerg est parlante. 19-11 à la pause pour le BBH, 22-20 au bout de 15 minutes où, certes Brest a totalement déjoué, mais quand même… D’ailleurs dès la fin de ce jeu, une fois la possibilité de qualification envolée pour Esbjerg, Brest a repris ses aises. Après on entend de ci de là, « La défense n’a qu’à s’adapter ! » Facile à dire, un peu plus compliqué à faire si, comme pour le Portugal, ce jeu est réalisé avec de très, très bons joueurs et que dire des Danois. Honnêtement, les Rui Silva, André Gomes, Fabio Magalhaes et autre, sont de tels joueurs que pour eux, pratiquer un jeu aussi simpliste leur est surtout un jeu d’enfant, on en revient aux – de 13… Certains « mal pensants » dans les techniciens français avaient émis l’idée que la mise en place de cette règle était pour stopper l’hégémonie tricolore sur le handball mondial. On espère que ce n’est que de la mauvaise foi après l’épisode belge… En tout cas, elle n’a fait que niveler le niveau par le bas et tout ce qui fait le sel du handball à 7 contre 7 disparait quasiment avec cette forme de jeu. 

Autre sujet qui là est plus mécanique qu’esthétique, c’est l’anéantissement quasi complet de l’effet des suspensions de deux minutes. A l’origine faites pour sanctionner un collectif et le mettre en difficulté temporaire, ces sanctions en arrivent à ne plus servir à rien. La raison en est simple. Par essence, on se fait sanctionner quand on est en défense, les 2 minutes sur attaque sont plus que rares, et le plus souvent c’est sur une action de but ou avec un jet de 7 mètres que tombe la sanction. L’équipe du fautif récupère donc la balle au début de la sanction. Si le collectif est discipliné et qu’il a un peu de savoir-faire, l’attaque à suivre va durer dans les 40 à 45 secondes, à égalité numérique bien sûr, puisque c’est autorisé. But ou pas derrière, elle doit ensuite défendre à 1 de moins, et une attaque placée en Handball dure dans les 30 à 40 secondes. But ou pas, l’équipe sanctionnée a encore 45 secondes de plus pour mettre en place son attaque. En bref, sur les 2 minutes d’exclusion, elle aura eu la balle 1’30 avec la possibilité de jouer à 7 contre 7, donc sans handicap… Autant rayer aussi l’exclusion temporaire de la règle et enlever 2 buts à l’équipe fautive, au moins il y aurait un impact !



On ne sait pas ce que cette règle du jeu en supériorité numérique va devenir… Si elle va être abolie ou non, modifiée, on ne voit pas comment ? Avec un retour à la chasuble… on re génère du foutoir sur les bancs de touche. Et si on disait tout simplement : Un gardien est un gardien, on doit en avoir un sur le terrain et si on a un joueur exclu on joue à 5 joueurs de champ ! Après si le gardien veut venir jouer en attaque, pourquoi pas, mais là on serait surpris de voir ça se jouer à très haut niveau… Ou alors, cela engendrerait une nouvelle génération de gardiens cyborgs ou mutants capables de jouer partout. Mais on le sait, ce sont les gardiens qui sont les clefs du jeu au Handball, alors un peu plus un peu moins… Autant finir sur un peu d’humour. 

Faut-il sacrifier le soldat « Jeu à 7 » ? 

International

lundi 15 mars 2021 - © François Dasriaux

 5 min 38 de lecture

Depuis les JO de Rio, le Handball se trouve dans une position assez délicate en termes de spectacle. L’instauration de la possibilité de jouer en supériorité numérique en attaque est en train de tuer tout le spectacle « Handball », limitant les innovations, réduisant les écarts et supprimant toute notion d’exploit individuel dans ce sport, par essence même, spectaculaire au possible.

 

Loin de là l’idée de crier haro sur le Portugal qui est sans doute l’équipe qui utilise le plus cette forme de jeu. Elle est autorisée, on est dans de la compétition à très haut niveau, tous les moyens légaux pour s’assurer la victoire sont donc bons à prendre. Il ne faut pas se tromper de combat, le Portugal n’a rien à se reprocher, pas plus que les joueurs du Qatar et le Qatar étaient à mettre au pilori en 2015 pour avoir bénéficié d’une règle bien trop laxiste de l’IHF sur les naturalisations. C’est la règle qui permet de faire, pas l’inverse… Les Portugais ont donc décroché leur ticket pour les JO de Tokyo en appliquant de façon presque parfaite cette tactique pendant toute la seconde période face aux Bleus. Les Croates sont out et que cela les fasse grincer des dents est compréhensible. En venir à accuser les Bleus de les avoir sciemment éliminés est plus cocasse si on s’en réfère au passé, mais bon, là aussi le débat n’est pas là.



Le débat est sur le spectacle pur et dur et à moins que tout ne change, c’est pour cela que les spectateurs et téléspectateurs vibrent pour un sport. Si on reste purement dans l’esprit nationaliste ou partisan, on donne de bien mauvaises odeurs au « supporterisme ». En réagissant à froid, si on enlève toute la dramaturgie du match France – Portugal, qui a vu un beau match de handball en seconde période hier ? Le jeu en supériorité numérique appauvrit totalement le spectacle. Il n’est fait que d’une seule phase : Les ailiers au point de corners qui ne toucheront la balle que pour tirer. Deux pivots sur les espaces 1-2 et 2-1 qui attendent la balle et proposent un bloc – débloc, voire un glissement sur 2-3 ou 3-2 potentiel. Et 3 arrières qui ne font qu’engagement – désengagement – réengagement pour trouver l’espace ou le joueur libre. Pour ceux qui ont entraîné ou entraînent encore, si ils le peuvent, une des séances de base pour les – de 13 pour leur apprendre le jeu en rupture et la lecture de jeu. En bref, on assiste à une séance de formation de jeunes jouée par des joueurs pros. Aucun enclenchement, aucun dépassement de fonction, aucun duel en 1x1, tout ce que font les magiciens du jeu, aucune initiative hors du schéma strict fait de passes sans même parfois bouger comme le font les Danois, piqués aux 9 mètres en attendant qu’un défenseur se désaligne pour jouer dans l’espace libéré. Bref, à regarder cela, on s’emm…. A 100 sous de l’heure. Même le handball féminin s’y met lui aussi, lui qui est un des derniers espaces de jeu collectif poussé et d’innovations tactiques. Esbjerg ayant joué ce type de jeu pendant 20 longues minutes en seconde période hier face à Brest en Ligue des Champions Féminine…



Car il ne faut pas se tromper non plus sur le pourquoi de la mise en place de ce type de jeu par les équipes. C’est avant tout pour niveler le jeu quand on est totalement à la rue face au niveau adverse. Là aussi l’histoire du Brest – Esbjerg est parlante. 19-11 à la pause pour le BBH, 22-20 au bout de 15 minutes où, certes Brest a totalement déjoué, mais quand même… D’ailleurs dès la fin de ce jeu, une fois la possibilité de qualification envolée pour Esbjerg, Brest a repris ses aises. Après on entend de ci de là, « La défense n’a qu’à s’adapter ! » Facile à dire, un peu plus compliqué à faire si, comme pour le Portugal, ce jeu est réalisé avec de très, très bons joueurs et que dire des Danois. Honnêtement, les Rui Silva, André Gomes, Fabio Magalhaes et autre, sont de tels joueurs que pour eux, pratiquer un jeu aussi simpliste leur est surtout un jeu d’enfant, on en revient aux – de 13… Certains « mal pensants » dans les techniciens français avaient émis l’idée que la mise en place de cette règle était pour stopper l’hégémonie tricolore sur le handball mondial. On espère que ce n’est que de la mauvaise foi après l’épisode belge… En tout cas, elle n’a fait que niveler le niveau par le bas et tout ce qui fait le sel du handball à 7 contre 7 disparait quasiment avec cette forme de jeu. 

Autre sujet qui là est plus mécanique qu’esthétique, c’est l’anéantissement quasi complet de l’effet des suspensions de deux minutes. A l’origine faites pour sanctionner un collectif et le mettre en difficulté temporaire, ces sanctions en arrivent à ne plus servir à rien. La raison en est simple. Par essence, on se fait sanctionner quand on est en défense, les 2 minutes sur attaque sont plus que rares, et le plus souvent c’est sur une action de but ou avec un jet de 7 mètres que tombe la sanction. L’équipe du fautif récupère donc la balle au début de la sanction. Si le collectif est discipliné et qu’il a un peu de savoir-faire, l’attaque à suivre va durer dans les 40 à 45 secondes, à égalité numérique bien sûr, puisque c’est autorisé. But ou pas derrière, elle doit ensuite défendre à 1 de moins, et une attaque placée en Handball dure dans les 30 à 40 secondes. But ou pas, l’équipe sanctionnée a encore 45 secondes de plus pour mettre en place son attaque. En bref, sur les 2 minutes d’exclusion, elle aura eu la balle 1’30 avec la possibilité de jouer à 7 contre 7, donc sans handicap… Autant rayer aussi l’exclusion temporaire de la règle et enlever 2 buts à l’équipe fautive, au moins il y aurait un impact !



On ne sait pas ce que cette règle du jeu en supériorité numérique va devenir… Si elle va être abolie ou non, modifiée, on ne voit pas comment ? Avec un retour à la chasuble… on re génère du foutoir sur les bancs de touche. Et si on disait tout simplement : Un gardien est un gardien, on doit en avoir un sur le terrain et si on a un joueur exclu on joue à 5 joueurs de champ ! Après si le gardien veut venir jouer en attaque, pourquoi pas, mais là on serait surpris de voir ça se jouer à très haut niveau… Ou alors, cela engendrerait une nouvelle génération de gardiens cyborgs ou mutants capables de jouer partout. Mais on le sait, ce sont les gardiens qui sont les clefs du jeu au Handball, alors un peu plus un peu moins… Autant finir sur un peu d’humour. 

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